A t-on trouvé un jour vie plus idyllique que celle d'un Clan ? Une manière de vivre moins dangereuse, moins injuste, moins cruelle ? J'en doute. Il eût été un Clan, il y a des Saisons et des Saisons, que l'on nomma le Clan de l'Hiver. C'est ainsi que commence cette histoire. Mon histoire.
Un œuf, puis, un Pokémon. Pensiez-vous que je sois né d'une manière plus ... Spéciale ? Qu'imaginiez-vous donc ? Ainsi soit-il. J'étais né comme n'importe qui. Croyez-vous que la vie est définie à l'avance, vous ?
La vie d'un Évoli n'est pas des plus simples. Mais cela, je ne pouvais pas m'en douter. Déjà, très tôt, je n'aimais que très peu la compagnie des autres. Oh, j'ai bien eu quelques amis. Mais je redoute que ce fût non pas de l'amitié mais plutôt une certaine pitié.
Je déteste cette idée. Mais hélas, je n'étais qu'un jeune apprenti, à cette époque.
La vie suivit son cours. Bientôt, j'atteignis l'âge de vingt-quatre lunes ; et me voilà lancé dans la plus excitante des aventures. Celle d'être apprenti. Je n'aurais pas imaginé, même pas un seul instant, du destin qui m'attendait.
*
Il faisait nuit lorsque je sortis du camp. J'étais en quête de gibier. La journée, pour moi, avait été catastrophique. À la chasse, je n'avais rien trouvé. Et au combat, ça n'avait été guère mieux. Je ratais mes coups, atterrissais plus que gauchement, et j'étais à chaque fois empli de honte. Cela m'était tout bonnement insupportable. Alors, je m'éclipsai doucement hors du camp. Au dessus de moi, les arbres dansaient au gré du vent ; les nuages épais s'écartaient élégamment, laissant apercevoir la lune ; et moi je filais, le pas léger, sur le chemin de terre sèche. Il faisait longtemps que je n'avais pas connu meilleure liberté, meilleur délice. La brise s'engouffrait dans ma fourrure, m'ébouriffait les poils. L'air était tiède, parfait. Les odeurs de gibier venaient de toutes parts, cela était exquis.
Et puis, je ne vis plus rien. La forêt avait disparu. Laissant place à une lumière aveuglément blanche. Elle l'était vraiment trop, trop intense. Les Bipèdes ? Les Bipèdes m'auraient-ils capturé ? Une peur panique se diffusa dans mon estomac. J'avais déjà entendu parlé de ces étranges créatures, de leurs instruments barbares pour capturer les Pokémon ... Peut-être était-ce mon tour ? Seulement, il se passa une chose à laquelle je ne m'attendais pas du tout. La lumière s'estompa, s'envola d'un coup. Tout redevint bientôt normal. Comme si rien ne s'était vraiment passé. Je reniflai l'air, mais les embruns de l'endroit ne présentaient rien du tout. Alors ? Rêve, vision ? Mais par peur, je détalai vers la maison. Quand je fus assez éloigné, je ralentis l'allure.
Je traînais les pattes en revenant vers le camp. Tout était raté ces temps-ci. Je ruminais sur cette vie de merde lorsqu'une giclée d'eau me frappa le visage avec force. Je reniflai, m'ébrouai. Cela me donna un élan d'adrénaline. Je venais de mettre le pied plein dans une flaque. J'aurais bien laissé passer cela, seulement ...
Lorsque j'observai la flaque, j'eus un mouvement de recul. Des yeux de sang brillaient dans le noir. Des lueurs jaunes illuminaient une face noire, et je dûs bien comprendre ce qu'il venait d'arriver.
Une fierté, pour certains.
Mais pas pour moi.
*
Je suis sûr que le Clan de l'Hiver n'a plus jamais entendu parler de Nuage de Jais.
Ils s'en foutent sûrement, à l'heure qu'il est.
Ils m'ont oublié. J'ai été jeté par mégarde dans les abysses de l'exil. Une bien belle métaphore. Je n'ai jamais eu de vrais amis, alors, quelle importance ? Jamais je ne leur pardonnerais. À la suite de ma mésaventure, je me suis enfui dans la nuit, et ne suis jamais revenu. Mais un jour, je reviendrais. Je les renverserais tous, un par un, je les tuerais tous jusqu'au dernier. Ils ont voulu n'instaurer que certains types, eh bien. Je vais leur en faire bouffer.
Attention à vos derrières, Clan de l'Hiver. Attention.